Ce mercredi 20 mai 2020, le Tribunal judiciaire de Nanterre tranché un contentieux opposant la société GEODIS CALBERSON Ile de France à la CGT et son CSE dans le cadre de la poursuite et de la reprise d’activité dans le contexte de l’épidémie de Covid-19.
La société GEODIS CALBERSON Ile de France, qui était représentée par le Cabinet LUSIS Avocats, appartient à la division Distribution & Express du groupe GEODIS ; son établissement situé à Gennevilliers est spécialisé dans la messagerie et le fret express.
Le 6 mai 2020, le Comité social et économique GEODIS et le syndicat CGT GEODIS ont assigné la société devant le Tribunal judiciaire de Nanterre en référé d’heure à heure.
Ils estimaient que la société GEODIS n’avait pas suffisamment évalué les risques inhérents à la pandémie de Covid-19 et que les mesures de prévention mises en place n’étaient pas suffisantes ; ils alléguaient également un défaut de concertation de la société avec les représentants du personnel, ainsi que le fait de ne pas les avoir associés à la définition des mesures de prévention des risques liés à la pandémie de COVID19.
La Fédération Générale des Transports et de l’environnement (FGTE-CFDT), le syndicat CFTC Transports de la région Ile de France, un salarié délégué syndical CFE-CGC de l’entreprise ainsi que plusieurs membres élus du CSE de l’entreprise sont intervenus volontairement à l’instance.
La décision rendue par le Tribunal judiciaire de Nanterre, qui rejette après examen au fond l’intégralité des demandes formulées, offre un éclairage précieux sur le cadre d’appréciation des obligations de l’entreprise dans ce contexte exceptionnel.
1/ Les demandes du CSE et du syndicat :
Les demandeurs sollicitaient, en substance, d’ordonner à la société de :
2/ La motivation de la décision et son analyse :
Le Tribunal judiciaire de Nanterre avait pour double mission :
Sur le fond, le Tribunal s’est livré à une analyse de chacune des demandes formulées par le syndicat CGT GEODIS, qui contestait la validité et la pertinence des plans de poursuite puis de reprise d’activité élaborés par l’employeur.
A titre préliminaire, le Tribunal rappelle le caractère évolutif du cadre réglementaire et des recommandations gouvernementales définissant les obligations de l’entreprise depuis le début de l’épidémie.
Il rejette ensuite successivement les demandes du syndicat et valide :
Il juge ainsi que le syndicat CGT, qui réclamait une évaluation des risques distinguant les différentes zones de travail (zone de chargement, zone de déchargement…), ne démontre pas en quoi certains postes seraient plus particulièrement exposés au risque de propagation du virus et ne fait pas état de risques spécifiques qui n’auraient pas été identifiés par l’employeur s’agissant des 7 unités de travail qu’il a déterminées.
« Il y a lieu de considérer que les représentants du personnel ont été associés certes tardivement à cette évaluation des risques. Cependant, le caractère tardif de cette concertation avec les représentants du personnel n’équivaut pas à une absence de concertation et ne suffit pas en l’espèce à ordonner de procéder à nouveau à cette évaluation en y associant les représentants. »
Le Tribunal rejette ainsi successivement les demandes du syndicat invoquant une insuffisance d’évaluation de certains risques, notamment et par exemple l’évaluation des risques psychosociaux induits par l’épidémie, celle des risques concernant les travailleurs intérimaires, celle des risques concernant les conducteurs externes arrivant sur le site…
« [Le syndicat] ne mentionne aucun manquement précis par la société à ses obligations en matière de santé et de sécurité des salariés ni ne démontre, comme l’exigent les dispositions de l’article 835 du Code de procédure civile, l’existence d’une violation manifeste des dispositions légales ou réglementaires en matière de santé et de sécurité, et notamment il n’établit pas que la société ne se serait pas conformée aux recommandations édictées par le gouvernement en matière de lutte contre le virus ».
3/ Portée et perspectives de la décision :
En cette période de reprise générale d’activité, cette décision complète l’édifice jurisprudentiel définissant le cadre des obligations de chaque employeur pour assurer la protection de la santé et de la sécurité de ses salariés.
Deux points doivent particulièrement retenir l’attention :
Cette décision vient néanmoins confirmer la jurisprudence rendue depuis le début du mois d’avril par différents Tribunaux judiciaires et en particulier, celui du Tribunal judiciaire de Nanterre, qui avait rendu le 14 avril, l’ordonnance condamnant la société AMAZON.
Il en résulte qu’en pratique, les démarches incontournables à mettre en place dans le cadre du plan de déconfinement des entreprises doivent :