Cass. soc., 11 mai 2023 n°21-22.281
Dans cet arrêt la Cour de cassation décide que le dépassement de l’amplitude journalière maximale de travail de 10 heures cause nécessairement un préjudice au salarié concerné.
En l’espèce, une salariée employée comme préparatrice en pharmacie pour un Ehpad est licenciée le 30 mars 2015. Elle saisit le Conseil de Prud’hommes et, parmi ses demandes, sollicite l’octroi de dommages et intérêts pour dépassement de l’amplitude horaire journalière de travail.
La Cour d’appel de Paris rejette cette prétention. Elle constate que, si la salariée a bien exécuté des journées de travail de plus de 10 heures, elle « ne démontre avoir subi aucun préjudice à ce titre, lequel ne peut être nécessaire mais doit être établi ».
Devant la Haute Cour, la salariée fait valoir que la méconnaissance des dispositions impératives relatives aux durées maximales de travail lui cause nécessairement un préjudice.
La Cour de cassation lui donne raison et casse l’arrêt de la Cour d’appel.
Elle rappelle à cet effet que les dispositions du code du travail sur la durée quotidienne effective de travail « participent de l’objectif de garantir la sécurité et la santé des travailleurs par la prise d’un repos suffisant et le respect effectif des limitations de durées maximales de travail concrétisé par la directive européenne 2003/88/CE sur le temps de travail ».
Elle en déduit que « le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation ».
Cette solution s’inscrit dans le prolongement d’un arrêt rendu par la chambre sociale le 26 janvier 2022, à propos de la durée maximale hebdomadaire de travail (Cass.soc.26 janvier 2022 n°20-21.636). A cette occasion, la Haute Cour avait posé le principe que « le seul constat du dépassement de la durée maximale hebdomadaire de travail ouvre droit à réparation ».
Plus globalement cette décision ajoute une exception supplémentaire au principe, affirmé depuis 2016, selon lequel le préjudice invoqué par le salarié doit être démontré pour pouvoir être réparé (cass.soc.13 avril 2016, n°14-28.293).
En l’espèce, cette exception est fondée sur l’application de la Directive Européenne relative à l’aménagement du temps de travail. Il est donc permis de se demander si cette solution sera étendue à toutes les durées maximales et aux minimums prévus par la Directive : temps de pause, repos hebdomadaire etc .