Cass. soc., 21 sept. 2022, n° 20-23.660
Un établissement d’enseignement sous contrat d’association avec le Ministère de l’agriculture informe son CSE de son projet de fermer un lycée professionnel et de résilier le contrat avec le Ministère à la prochaine rentrée scolaire. Une réunion de consultation du même comité sur les orientations stratégiques de l’entreprise devait intervenir quelques jours plus tard. Le CSE demande la suspension de la consultation sur le projet de fermeture du lycée et de résiliation du contrat d’association jusqu’à la clôture de la consultation sur les orientations stratégiques, considérant que ces deux consultations avaient le même objet.
Le Tribunal judiciaire de Bobigny (Ordonnance du 02 Juillet 2020 – RG n° 20/03845), puis la Cour d’appel de Paris (Arrêt du 29 octobre 2020 – n° 20/04265), ont approuvé la demande du CSE et ont ordonné la suspension de la première consultation en retenant que les deux décisions envisagées constituaient un choix stratégique résultant notamment d’une dégradation de la situation économique, d’une trésorerie insuffisante, de l’impossibilité pour l’établissement de s’endetter en vue de financer les travaux d’entretien et de rénovation nécessaires, d’une baisse de fréquentation du lycée et de la volonté de rétablir un équilibre financier après plusieurs années de déficit. Le premier choix était donc la déclinaison concrète d’une orientation stratégique.
Les deux juridictions en déduisent que la consultation du CSE portant sur les orientations stratégiques aurait dû être préalable à celle portant sur le projet de fermeture.
La Cour de cassation n’approuve toutefois pas ce raisonnement.
Elle retient que « la consultation ponctuelle sur la modification de l’organisation économique ou juridique de l’entreprise ou en cas de restructuration et compression des effectifs n’est pas subordonnée au respect préalable par l’employeur de l’obligation de consulter le CSE sur les orientations stratégiques de l’entreprise« .
Dans sa note explicative, la Cour précise que la consultation sur les orientations stratégiques « offre un cadre à une discussion prospective sur l’avenir général de l’entreprise, distincte des consultations ponctuelles du comité social et économique relatives à un projet déterminé « .
Ainsi que le rappelle cette même note explicative, ce débat est récurrent depuis la loi n°2005-32 du 18 janvier 2005. Dans ce cadre, la Cour de cassation avait déjà jugé, pour mettre fin à des décisions divergentes de juridictions de fond, que la consultation du CE sur un projet ponctuel n’avait pas à être précédée ni de la consultation annuelle du CE sur l’évolution des emplois et des qualifications, ni de la négociation triennale sur la GPEC (Cass.Soc., 30 sept. 2009, n° 07-20.525).
Depuis cette date, certaines juridictions de fond persistaient cependant toujours à imposer ce caractère préalable, y compris depuis la redéfinition des blocs de consultation et de négociation issue de la loi n°2015-994 du 17 août 2015.
Cette décision devrait donc permettre de limiter les débats à l’avenir, sur l’articulation de ces deux types de consultation.