Cass. Soc., 11 septembre 2024, n°23-12.500
Contester la nécessité du recours à l’expertise par le CSE peut s’avérer délicat : il est cependant possible de démontrer que l’expertise n’est pas utile, voire que le CSE a usé de son droit de manière abusive.
Dans un arrêt du 11 septembre dernier, la Cour de cassation donne quelques indications intéressantes sur le caractère abusif d’un tel recours.
En l’occurrence, le CSE d’une entreprise a décidé de recourir successivement à deux expertises au cours du même mois : l’une à l’occasion de l’information-consultation sur la situation économique et financière de l’entreprise, l’autre dans le cadre de l’exercice de son droit d’alerte économique.
Sans remettre en question l’exercice de son droit d’alerte par le CSE, l’employeur a contesté la nécessité de la seconde expertise. Les juges du fond lui donnent raison aux motifs que :
-Les deux expertises se sont succédées dans le même mois, avec le même cabinet, et leur contenu serait donc très proche,
-Les coûts importants que la nouvelle expertise allait générer doivent être pris en considération, au vu des difficultés économiques de la société.
Le CSE et l’expert se sont pourvus devant la Cour de cassation qui a confirmé le jugement, considérant que le CSE avait été suffisamment éclairé par la première expertise qui portait sur la situation économique et financière de la société.
Elle souligne au surplus, que « le comité ayant décidé de recourir à 14 expertises en 2 ans et demi, dont 3 dans le cadre d’un droit d’alerte économique, l’expertise avait un caractère abusif ».
Cette dernière mention conduit à considérer que c’est la spécificité des faits qui a permis à la Cour de cassation de reconnaitre l’exercice abusif de son droit par le CSE.
Ainsi, par cet arrêt la Cour de cassation rappelle que le droit pour le CSE de recourir à l’expertise n’est pas absolu : il doit pouvoir démontrer que la désignation d’un expert a une utilité, et le recours manifestement excessif à l’expertise pourra conduire à caractériser un abus dans l’exercice son droit.