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La lenteur de l’employeur dans la gestion de l’inaptitude constitue un manquement dont le juge doit apprécier la gravité lorsque le salarié sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail

Cass, Soc., 4 décembre 2024, n° 23-15.337

En l’espèce, un salarié avait été déclaré inapte le 11 juin 2019, l’avis médical ne permettant pas de comprendre si l’état de santé du salarié permettait son reclassement.

L’employeur a repris le paiement du salaire en septembre 2019 et proposé un reclassement à l’étranger le 10 octobre 2019, refusé par le salarié. Il a demandé des précisions au médecin du travail le 14 octobre 2019 et consulté les autres sociétés du groupe pour un éventuel reclassement le 29 novembre 2019.

Le salarié a saisi le conseil de prud’hommes le 31 janvier 2020 d’une demande de résiliation de son contrat de travail, avant d’être licencié le 26 mars 2020 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le salarié soutenait que la résiliation judiciaire de contrat était notamment justifiée par l’inertie de son employeur qui l’avait laissé dans une situation d’inactivité sans lui proposer de poste de reclassement ni le licencier.

La Cour d’appel constate que l’employeur a tardé dans sa recherche de reclassement puis dans la procédure de licenciement. Toutefois, elle déboute le salarié en jugeant que, dès lors qu’aucun délai n’est fixé pour l’obligation de reclassement, la lenteur de l’employeur ne pouvait constituer un manquement à ses obligations.

Saisie d’un pourvoi formé par le salarié, la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel en jugeant «qu’il ressortait de ses constatations que le salarié avait été maintenu dans une situation d’inactivité forcée au sein de l’entreprise, le contraignant ainsi à saisir la juridiction prud’homale, ce dont elle aurait dû déduire l’existence d’un manquement de l’employeur à ses obligations et qu’il lui appartenait de dire si un tel manquement était d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail […] ».

L’arrêt est rendu au visa des articles L. 1226-11 et L. 1222-1 du Code du travail, ce dernier posant le principe selon lequel le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

Ce principe impose donc à l’employeur de réagir promptement en présence d’un arrêt d’inaptitude, de manière à ne pas laisser le salarié dans une situation d’inactivité forcée, peu importe que la loi ne fixe aucun délai.

Il restera à la Cour d’appel de renvoi de déterminer souverainement si la faute de l’employeur était d’une gravité suffisante pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail.